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Club Minéralogique et Paleontologique des 3B
5 février 2010

Les magnétites d'Aste-Béon (64)

 Les magnétites d'Aste-Béon

Eric Thomas

Ce gisement de fer est connu … depuis bien longtemps puisqu’il fût le siège d’une exploitation au moins dès 1650 (parions que les romains avaient déjà fureté par là); le minerai étant fondu alors aux forges de Béon (qui utiliseront aussi le minerai de la mine de Barburet (Louvie-Soubiron, Ferrières) et de la Groute (Arbéost – je n’ai pas retrouvé ces entrées, malgré une visite approfondie de la rive gauche de l’Ouzoum : si quelqu’un sait où elles sont…) pendant la Révolution et jusqu’au XIXème siècle). L’activité minière concentrée à flanc (abrupt) de ruisseau était articulée autour de 3 galeries superposées verticalement et distantes de 10 à 20m les unes des autres, la plus profonde étant la galerie inférieure qui, comme la galerie intermédiaire inclinée, sont actuellement noyées.

Figure 1 : localisation du gisement :

Aste

La géologie du secteur n’est pas très facile à aborder car le recouvrement par des éboulis (calcaires ocres crétacés et jurassiques situés en amont et « au-dessus », boules d’ophites…) et les reliquats de moraines (blocs plurimétriques de granite clair) sont importants : la carte géologique (Feuille 1/50.000 Laruns – Somport, où la position des galeries est en partie erronée, comme surtout l’indice sur Infoterre par ailleurs) mentionne que le gisement se situe dans du Carbonifère mais mes constatations rapides sur le terrain ont montré que le Carbonifère était dans ce secteur uniquement constitué de schistes noirs et grès fins, très rythmiques et parcourus de veinules à quartz-calcite dont aucune ne semble minéralisée ou cristallisée. Il ne semble pas y avoir de lentilles calcareuses dans ce Carbonifère et je penche donc plutôt vers quelque-chose plus proche d’un Dévonien moyen à supérieur (comme à Ferrières, « juste de l’autre coté ») mais malheureusement, les contacts ne sont pas visibles sous les formations superficielles (à noter que les auteurs de la notice, dans la section « Gîtes et indices » mentionnent le gisement effectivement dans du Dévonien…ce qui est rassurant).


Le gisement proprement dit est constitué par des imprégnations ferreuses, formant un couloir grosso-modo vertical, dans un calcaire rose-beige cataclasé. Ces imprégnations importantes se développent sur une dizaine de mètres de large au mieux selon une direction globalement E-W : les porteurs du fer recherchés étaient l’hématite (variété oligiste) et l’ankérite [Ca(Fe,Mg,Mn)(CO3)2], cette dernière étant tellement abondante parfois que l’on peut considérer que l’on a affaire à une ankérite-sidérite « massive ». Dans cette ankérite, quelques petites vacuoles sont ouvertes mais ne sont jamais très développées : elles montrent des cristallisations de qualité médiocre.

Figure 2 : quelques cristallisations sidéro-ankérite dans de petites vacuoles

Photo1

On compte en plus de l’hématite et de la sidérite(ankérite) au moins deux ou trois minéraux ferreux d’altération dont limonite et goethite pour les oxydes. Ce calcaire « sidéritique » ou « ankéritique » est parcouru de veines (>20cm de puissance parfois) remplies de calcite, postérieures au développement de la minéralisation ferreuse : elles renferment des pyrites en amas massifs (>5cm de diamètre) ou en petits cristaux cubiques à troncatures complexes (le plus gros que j’ai vu fait environ 1cm) ainsi que - il me semble mais je n’en suis pas certain - de la chalcopyrite en mouches. Quelques cristaux blanchâtres à sections hexagonales sont aussi présents, très ruiniformes et je ne sais pas vraiment déterminer ce que c’est (ce n’est pas attaqué par HCl ; je pense à quartz mais un quartz saccharoïde un peu étrange !)


La magnétique automorphe est présente dans toute la colonne calcaire mais les plus beaux individus se localisent en bordure de « rognons » calcaires émoussés (zonalité ?), faisant ressembler l’ensemble à une « brêche » minéralisée à éléments arrondis, ces éléments étant parcourus par de fins filonnets d’oligiste souvent altérée. Malheureusement, c’est également en bordure de ces rognons que s’est développée une importante couronne d’oxydes (les magnétites sont aussi parfois altérées), épaisse parfois de plus de 2cm.

Figure 3 : un bloc de calcaire (champ de la photo = 10-12cm) montrant la multitude de magnétites (petites), ainsi qu'une frange altérée à hématite (haut de l'échantillon)

Photo2

Depuis la cessation de l’activité, le gisement est tombé dans les oubliettes mais est mentionné (évidemment !) par Barrois. Ce n’est finalement qu’assez récemment (20-30 ans ?) et grâce à la perspicacité de quelques-uns dont Mr Luis Trévino que le gisement a été retrouvé. Depuis, nombre de clubs locaux s’y sont rendu avec toujours de très belles récoltes, le matériel y étant « quasi » inépuisable. Les recherches fructueuses se font dans les éboulis-haldes sous et autours des galeries principales ; les parois des galeries montrent des minéralisations mais les roches y sont très résistantes et moins fournies en magnétites que les « déchets ».

Figures 4 et 5 : quelques vues d'échantillons à magnétites

Photo3

 

Photo4

 

Figure 6 : une magnétite (altérée) en vue rapprochée - taille 0.5cm environ

 

Photo5

Merci à Marcel, Jo, Michel et Luis pour les infos précieuses dans la localisation du site...

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Commentaires
J
Bravo Eric pour cette révision trés constructive des mines d'Aste Béon. J'apprécie tout particulièrement la relation avec les roches encaissantes et leur âge mais aussi la multiplicité des minerais de fer; il n'y a pas que de la magnétite à Aste Béon !
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